Aujourd'hui je vais vous raconter une histoire, celle d'une toute jeune femme. Elle pourrait être votre sœur, votre fille, votre voisine, votre collègue... elle pourrait être vous.
Ils étaient jeunes, ils étaient adultes, mais encore des enfants. Ils expérimentaient la vie, ils découvraient l'amour.
Ses yeux bleus, son côté bad boy au cœur tendre ont eu raison d'elle...les papillons dans le ventre. Alors c'est ça l'amour ?
Ils s'étaient trouvés au moment où leurs vies avaient basculé, leurs repères avaient volé en éclats. Ils se sont accrochés l'un à l'autre en pleine tempête.
Il était tendre, avec parfois ses coups de sang. Il était romantique, et un brin jaloux. Il exprimait sa colère contre sa famille, contre lui-même, contre les événements. Elle, était plutôt renfermée. Il était parfois prévenant, parfois égoïste, parfois rieur, parfois boudeur. Ils s'aimaient, se disputaient, se réconciliaient...comme tous les couples... ?
Octobre : ils quittent le foyer et emménagent ensemble. Et là, quelque chose change. On attendait d'elle qu'elle s'occupe de lui, comme une mère le ferait...est-ce bien son rôle ? Et puis, lui, n'en faisait qu'à sa tête maintenant qu'il était libéré de sa famille. Il dépensait tout son argent : console de jeu, télé écran plat, mini moto, chien, cannabis...ah oui, parce que de fumeur festif (un petit joint pendant une soirée) il est passé à drogué en quelques semaines... c'est-à-dire joint dès le matin...qui remplace la cigarette. Elle, galérait à trouver un job. Le premier emploi, toujours un peu difficile à trouver car pas d'expérience professionnelle. Elle en a quand même trouvé un. Pas le job de ses rêves, mais de quoi payer les factures.
Lui, devenait de plus en plus possessif, jaloux et la dénigrait « Tu es feignante », « Ta famille n'en a rien à faire de toi ». C'est ça la vie de couple ? C'est une mauvaise passe. S'installer ensemble demande quelques ajustements. Elle se demande si elle doit s'imposer un peu plus mais, quand elle ose dire non, lui s'emporte...jusqu'à ce soir de décembre.
« - Il est où mon magazine Moto Verte que je viens d'acheter ?
_ J'en sais rien, répond-elle.
_ Tu l'as planqué ?!
_ Pourquoi j'aurais fait ça ??? »
Il la plaqua contre le mur en levant le poing sur elle. Il a sûrement dit quelque chose mais elle ne s'en souvient pas. Choquée... Vous allez me demander : et son magazine ? Mais où était-il ? Mmh, il l'avait oublié dans la voiture...
A partir de ce jour, elle avait vraiment peur de lui, n'osait plus le contrarier, dire non (à tout)...
Fêtes de fin d'année en famille. Il se montre sous son meilleur jour.
Puis il partit en vacances au ski avec ses potes (il s'était payé ça aussi), en la laissant seule chez eux. Elle se sentait revivre...tout en appréhendant son retour. Là elle se rendit compte que pour elle c'était fini...mais... Et lui ? Comment va-t-il réagir ? Et surtout, il fallait qu'elle retrouve du travail (son CDD se terminant). Sans ça, pas de départ possible.
Le revoilà, tout sourire, tout bronzé (du visage avec la marque des lunettes...trop classe) avec un petit cadeau pour elle. Elle vivait la boule au ventre, marchait sur des œufs. Lui, ne fonctionnait presque plus qu'au chantage : si elle ne se pliait pas à ses demandes, elle pouvait faire ses valises et partir...pour aller où ?
Et puis vint LE soir...Elle dit « non »...elle cria « non », « arrête »...suivi du vide, du déni.
Les semaines qui suivirent sont floues pour elle. Chantage, tendresse, peur, « je t'aime », soumission... Seule... Comment c'était arrivé ? Pourquoi était-elle seule, personne sur qui compter ? Sans issue. Au mois de février elle retrouva du boulot...ça tombait bien...
Le 25 février :
« _ Elles sont où mes chaussettes de cross ? » Ouais, bon, vous allez vous dire « mais il ne sait pas où il range ses affaires ? ». C'est désespérant !
« _ J'en sais rien...au sale ?
_ Ben non, elle n'y sont pas j'ai regardé ! Tu les as mise où ?
_ Je n'y ai pas touché à tes chaussettes ! ». Le ton avait monté au bout de quelques minutes d'accusation...
Et, sans trop savoir comment, ni pourquoi, elle se retrouva par terre, avec lui sur elle, qui essayait de lui saisir la gorge, avec ce regard...celui qui fait froid dans le dos. La seule prise qu'elle eut, son collier (vous savez, les grosses chaînes pour homme). Elle tira de toutes ses forces sur le côté pour l'éloigner. Jusqu'à ce que le collier cède. Il s'arrêta net en gueulant parce qu'elle lui avait cassé son collier. Il repartit chercher ses chaussettes.
Quatre jours plus tard elle signa le bail de son appartement et déménagea. Lui, pleura, menaça de se suicider. Les semaines qui suivirent, il la suivit, menaça plusieurs fois de mettre fin à ses jours, réussit à se faire embaucher dans la même boîte qu'elle...elle est retombée dans ses bras, pendant une semaine, elle l'a quitté de nouveau... puis il la suivit, menaça de se suicider...
Elle était au fond du gouffre, seule, détruite, telle une coquille vide. Un corps avec plus rien à l'intérieur... et une solitude indescriptible...non c'est faux. Lui était là. Il voyait qu'elle n'allait pas bien mais il ne réalisa jamais que c'était à cause de lui.
Elle voulait en finir, elle a fait ce qu'il fallait pour échapper à cette vie..il a appelé les secours...
Celui qui lui avait pris son âme, presque sa vie...l'a sauvée...pour mieux la garder près d'elle.
Se défaire de son emprise, en prenant ses distances. Retrouver l'estime de soi, se reconstruire. Sortir du déni et mettre le mot « viol » sur ce souvenir qui tourne en boucle dans sa tête. Retrouver l'estime de soi à nouveau, essayer de se reconstruire encore, pendant des années, malgré l'anxiété omniprésente, cette fureur qui consume. Accepter qu'il y a un avant, et un après. Faire le deuil de ce qu'on était, une personne soumise, pour devenir une survivante. S'en sortir grandie, forte, puissante. S'en sortir fière.
L'amour a aidé, cette rencontre, un homme profondément tendre et respectueux, compréhensif, a aidé à guérir ses blessures. Elle a grandi, évolué, est devenue forte. Elle est devenue prête à accompagner les femmes qui ont vécu les mêmes choses.
Elle c'est moi...et ça peut être vous, votre sœur, votre fille, votre voisine, votre collègue.
Victime pour sortir de cette situation, survivante pour se reconstruire...aujourd’hui actrice du changement pour vous accompagner et devenir à votre tour une survivante. Vous montrer les ressources que vous avez en vous, révéler votre puissance, voilà la vie que je mène aujourd'hui.
Tout ceci pour vous faire comprendre, Mesdames, qu'ici, vous ne serez pas jugées, qu'il n'y a pas de honte à avoir, que vous serez entendues, comprises. Pour vous offrir un endroit bienveillant, un accompagnement dans le respect de vos attentes, de votre rythme.
Prenez soin de vous
Julie
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